Comment je construis mes nouvelles ?

Ecrire une nouvelle c’est tout un programme, qu’elle soit SF, Fantasy ou de n’importe quel autre genre. J’avoue ! Pour ma part, ça vient tout seul (pardon pour ceux qui sont sous l’emprise de la page blanche, ça ne m’est encore jamais arrivé).

Etude de cas : Jacob et le Génie

Avant de découvrir mon processus créatif, je te recommande de lire la nouvelle “Jacob et le Génie” qui va me servir d’exemple (de 5 à 10mn de lecture).

Découvrez ma nouvelle Jacob et le Génie

Tu peux aussi voir comment j’ai géré cette histoire avec mon article sur l’organisation.

En savoir plus : Comment organiser ses histoires ?

Etape 1 : Connaître la fin de l’histoire

Pour une nouvelle, comme n’importe quelle histoire d’ailleurs, je pars du principe qu’il faut que je sache comment elle se termine. Si je ne sais pas, c’est qu’il n’y a pas d’histoire.

Je me laisse toute latitude pour changer d’avis évidemment… rien n’est immuable.

Bien sûr on peut se lancer tout de go en se disant que ça finira par venir, mais à mon humble avis, c’est comme l’histoire du gars qui se jette du haut d’un building et qui se dit, à chaque étage :
– « Jusque là, tout va bien ».

Tu peux avoir du bol et trouver ta fin en cours de route, mais sérieusement, compter sur la chance dans un projet d’écriture (ni aucun autre d’ailleurs), très peu pour moi.
Vu de ma fenêtre, c’est plus un cauchemar qu’autre chose.

Chez moi donc, tout commence par l’idée d’un twist… une surprise.
– « Tiens ce serait marrant que… et à la fin en fait, PAF ! Le lecteur découvre que… ».
Voilà mon graal.

Un petit moment délicieux en tant qu’auteur, où tu retournes une situation pour espérer entendre ton lecteur dire :

  • “Ah ouais, la vache ! Je l’ai pas vu venir celle-là !”

Il paraît que ce n’est pas lié à l’exercice de la nouvelle, mais personnellement je ne l’imagine pas sans cela.



Les idées de ce genre me viennent en laissant traîner mon imagination, mais surtout en poussant le bouchon un peu loin… maurice ^_^

Dans la nouvelle « Jacob et le Génie », j’avais déjà rédigé un bout de discussion entre un génie et un mendiant (Entretien avec un génie, à paraître aux éditions… non je déconne, c’est un brouillon). L’idée générale était de faire en sorte que le mendiant explique notre monde au génie, inconnu de ce dernier à cause de son “sommeil” dans sa lampe de plusieurs centaines d’années. Ca devait s’étaler, être philosophique, etc.

Attention dernier avertissement… je vous aurais prévenu, lisez la nouvelle d’abord.

Découvrez ma nouvelle Jacob et le Génie

Et puis je me suis dit : « Et maintenant que le génie connaît le monde… et s’il ne retournait pas dans sa lampe ?” (je t’avais dit de lire la nouvelle d’abord).

J’ai immédiatement stoppé la rédaction de l’entretien et j’ai commencé une nouvelle histoire avec un objectif : le génie ne retournera pas dans sa lampe à la fin.
J’avais la fin de mon histoire, mon twist.

Etape 2 : Préparer le twist

Attention, ce twist ne peut pas venir de n’importe où. Quand un élément arrive sans que le lecteur ne sache d’où il vient, ça s’appelle un Deus Ex machina : une intervention divine.
Personnellement, je trouve ça moche. Trop facile. C’est un peu prendre le lecteur pour un imbécile.

– « Mais si, en fait l’inspecteur trouve qui est le meurtrier parce qu’il a trouvé le mégot sous le canapé avec son ADN dessus, mais personne n’était au courant »… ben voyons.

Si le lecteur n’a pas entendu parlé du mégot auparavant, même succinctement, la résolution de l’affaire tombe à plat. C’est une des utilisations du principe dramaturgique appelé Fusil de Tchekhov (le dramaturge russe, pas Checov, pilote de l’USS Entreprise).

Supprimez tout ce qui n’est pas pertinent dans l’histoire. Si dans le premier acte vous dites qu’il y a un fusil accroché au mur, alors il faut absolument qu’un coup de feu soit tiré avec au second ou au troisième acte. S’il n’est pas destiné à être utilisé, il n’a rien à faire là.

Anton Tchekhov

L’inverse est donc selon moi, tout aussi vrai. Si le coup de feu est tiré avec un fusil qu’on a pas présenté au lecteur auparavant, on obtient une action qui vient de nulle part. C’est certes une surprise, mais de mon point de vue, une mauvaise surprise.

Pour l’histoire de Jacob, je donne une piste dès le début de la nouvelle en parlant de lui s’ennuyant sur son radeau. Le radeau fait parti du twist et le lecteur ne découvrira qu’à la fin ce qu’il est réellement.
Je précise que que dans cet exemple, le FdeT que j’utilise est une partie intégrante du twist, mais il n’est pas le twist lui-même. C’est un élément de préparation.

Le twist est prêt, il est dans la tête du lecteur, bien bien. Problème, qu’est-ce que je met entre les deux ? Comment rendre la chose intéressante ?

Etape 3 : les personnages

Dans mon esprit malade d’auteur génial et créatif (oui oui, c’est de l’auto-pommade), il fallait que le lecteur éprouve de la sympathie pour celui qui aurait droit à ses trois voeux. Je voulais qu’on ait envie qu’il réalise ses souhaits, jusqu’au moment où ça partirai de travers.

Le personnage devait être quelqu’un avec une vie pas facile qui verrait immédiatement l’intérêt de pouvoir faire trois voeux. Mais je ne voulais pas tomber dans le mièvre avec une “causette” implorant les larmes aux yeux. L’adhésion aurait certes été immédiate, mais c’était une histoire tellement entendue que… non, il me fallait autre chose.

Donc Jacob.
Un voleur sans foi ni loi, qui croit avoir tout compris de la vie et qui ne s’en laisse pas compter. Au cours de l’écriture, j’ai même poussé un peu en le rendant franchement salaud (cf le passage où il détrousse la dame).
Restait le second protagoniste important, mais qui, contrairement aux histoires de génie que j’ai pu lire, n’a pas envie, mais pas envie du tout d’aider Jacob dans ses choix.
C’est un salaud, faut pas pousser.

Etape 4 : Faire monter la tension

Pour cette nouvelle, il était important de faire monter la pression pour Jacob. Que pouvait-il bien demander au Génie ? Pourquoi son premier voeu n’aurait-il pas été d’être heureux tout simplement ?

Cherchez pas : c’est un salaud, point c’est tout !

Donc il fait un voeu : la richesse. C’est génial, mais ça part en cacahuète. On veut lui prendre… et on y arrive. Il fait son second voeu : le pouvoir. Et rebelote, il s’en sort pas. On lui reprend le pouvoir aussi parce que… ben parce que c’est quelqu’un qui n’a pas l’habitude du pouvoir. Nous ne sommes pas tous nés pour être roi. Vient alors le troisième voeu…

Etape 5 : Tadaaaaa !

Son troisième voeu : la liberté, vient après que j’ai amené le lecteur à comprendre que des années de prison avait changé Jacob. Ca y est, le lecteur aime Jacob en fin de compte. Il est devenu sage et c’est chouette, vive Jacob.

C’est le moment de placer le retournement de situation.

L’objectif est de marquer le lecteur, qu’il finisse la lecture sur ce coup de massue dramatique (je sais j’en fait des tonnes, mais c’est moi qui écrit).

Le génie annonce à Jacob qu’il va prendre sa place dans la bouteille.

Ouais je sais, je l’aime bien ce gif ^_^

Selon mon point de vue, plus c’est proche du point final, mieux c’est.
Si c’est amené trop tôt en amont, que le lecteur doive encore lire tout un long paragraphe, il ne restera pas sur son : “Quoi ! C’est dingue !!!” ou “Ah merde, le pauvre !”.

Bref, vous avez compris l’idée.

Les quelques nouvelles que j’ai écrites fonctionnent toutes de la même façon et au vu des retours que j’en ai, je pense tenir le bon bout :

  • un ou deux personnages
  • une montée en tension
  • un twist

Dans la figure ci-dessous, je te montre que l’histoire commence bel et bien par la fin.
On retourne au début pour comprendre comment on est arrivé là et surtout pour comprendre ce qu’on a lu.

Bien sûr je le répète, tout cela n’est que mon point de vue, à moi, perso, de “jeune auteur”.
Dans une nouvelle tout est possible, y compris de ne pas utiliser le fusil de Tcheckov, ou de ne pas mettre de twist.

Parce que finalement dans vos écrits, vous êtes Dieu lui-même, et Dieu… il fait ce qu’il veut ^_^

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